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12 décembre 2015 6 12 /12 /décembre /2015 00:32

Les saints politiques

Les saints (saintes) sont des chrétiens proposés après leur mort comme modèles aux autres chrétiens.

Jusqu’au Xesiècle, il n’existe pas de procédure centralisée pour déclarer une personne sainte, c’est la vox populi, les saints sont désignés par acclamation et l’évêque du lieu confirme par une cérémonie solennelle. L’usage n’a plus cours même si des fidèles ont essayé de le réactiver lors des obsèques de Jean-Paul II, en criant « Santo subito ». -

A partir de l’époque carolingienne, le Saint-Siège juge nécessaire de lutter contre les proclamations populaires fantaisistes ou trop émotionnelles. La remise en ordre se termine au concile de Trente (1545-1563), le concile de la contre-réforme qui décide aussi du culte des saints.

La proclamation est faite par le pape à la suite d'un procès qui examine les vertus et les défauts du candidat.

Les papes canonisent toutes sortes de saints, des martyrs, des mystiques, des stigmatisés, des fondateurs d'ordres, des modèles de charité, des défenseurs de la foi chrétienne et de l’autorité pontificale, ce qui est notre propos.

Les papes sont les chefs d’une grande puissance sans armée, ils utilisent la canonisation comme une arme politique pour faire plier le pouvoir civil.

Parmi les saints canonisés pour motif politique, on trouve

Des papes 80 papes ont été canonisés (on n’est jamais mieux servi que par soi-même).

La canonisation de Jean-Paul II en est un exemple contemporain, la sainteté de ce pape tient d’abord à sa lutte contre le communisme.

Des rois –
Ils sont élevés au rang de saints pour célébrer leur action en faveur de la religion et, surtout, pour encourager leurs successeurs à les imiter.

Chez les traditionnalistes, il existe encore des groupes de pression qui veulent obtenir la canonisation du roi Bauduin de Belgique et même celle d’Isabelle la Catholique, reine de la reconquista et de l’inquisition espagnole.

Presque tous les royaumes d’Europe ont au moins un roi saint. Pas de jaloux

Canut, Roi du Danemark, Casimir, ancien moine de Cluny devenu roi de Pologne, Ferdinand, Roi de Castille et de Léon, Etienne, Roi de Hongrie, Henri, Empereur germanique
Édouard le confesseur, Roi d’Angleterre, Éric, Roi de Suède, Olaf, Roi de Norvège.

En France, le plus célèbre est Louis IX,plus connu sous le nom de Saint Louis (1214 -1270).

Il fut canonisé en 1297 sous le règne de son petit-fils Philippe IV le Bel

Il fut un modèle du roi soumis au pape

Sous le règne de Saint Louis

l'Inquisition s'instaure en 1233 dirigée par les Dominicains et placée sous contrôle de la papauté,

La citadelle de Montségur, dernier refuge des cathares, est prise par l'armée royale en 1244 : 200 albigeois refusant d'abjurer seront brûlés.

Saint Louis protégera les chasseurs de sorcières et imposera aux juifs le port d'une "rouelle jaune" ancêtre de l’étoile de la même couleur.

La piété du roi était donc insensible à la tolérance, notion d'ailleurs inconnue à cette époque !

En canonisant le grand-père, le pape Boniface VIII voulait encourager la soumission du petit fils. Peine perdue, peu de temps après, Philippe le Bel lève un impôt sur le clergé qui en était jusqu’alors exempté, et en 1309, pour mieux le dominer, il contraint le pape Clément V à s’installer en Avignon.

Des reines

L’église a toujours compté sur leur femme pour influencer les rois.

Le modèle fut Clotilde, l’épouse de Clovis, chef franc considéré par la tradition comme le premier roi de France.

Clotilde partage la gloire d’avoir amené Clovis au baptême avec Rémi, l’évêque de Reims, également canonisé .

C’est beaucoup plus qu’une anecdote. Clovis, était un cher barbare parmi d’autres, le chef des Francs, il avait entrepris la conquête de la Gaule.

L’hérésie arienne était plus répandue que le christianisme auprès des armées germaniques mais c’est le christianisme qui était la religion majoritaire de la gaule. En optant pour le baptême chrétien, Clovis a réalisé pour des siècles l’union d’un chef, d’un peuple et d’une religion.

Clovis était assez intelligent pour avoir fait le calcul lui-même mais pour l’église, la conversion du roi est due à la bonne influence de sa sainte épouse.

Par la suite, la même injonction a pesé sur toutes les reines : faire accepter les volontés de l’église à leur royal époux. (ex. Ste Bathilde épouse en 649 de Clovis II, elle utilise sa situation de reine pour installer à la cour une rigueur morale fort peu à la mode au temps des Mérovingiens)

Des mères.

D’autres femmes ont exercé une influence religieuse, ce sont les mères de rois.

Une « régionale de l’étape », Ida de Boulogne (1040-1113).

Descendante de Charlemagne, nièce du Pape Etienne XI, épouse du Comte Eustache de Boulogne qui sauva Guillaume le Conquérant à la bataille d'Hastings.

C’est la mère de Godefroy de Bouillon qui a pris Jérusalem lors de la première croisade et a laissé le souvenir d’un homme très pieux « l’avoué du Saint Sépulcre ».

Comtesse à bonnes œuvres, on lui doit plusieurs églises, dont la première église St Léger de Lens.

Longtemps oubliée, son culte s’est réactivé dans le Pas de Calais au XXème siècle,

les conseillers des rois.

L’expérience est parfois conflictuelle. Des ministres ont été canonisés pour avoir pris le parti de l’église contre leur souverain.

Les plus connus sont deux Thomas anglais.

Thomas Becket (1120) –1170)

Henri II Plantagenet (1133-1189) voulait établir un impôt sur le clergé,

il a donc nommé archevêque de Cantorbery Thomas Becket, un de ses compagnons d’orgies, mais, déjouant les prévisions, Thomas défendit les intérêts du clergé au lieu d’obéir au roi.

Des hommes de mains devancèrent la volonté du roi et assassinèrent Thomas devant son autel le 29 Décembre 1170.

Thomas fut immédiatement canonisé (3 ans, pour un procès de canonisation, c’est rien) et l’interdit fut prononcé sur le royaume. Henri II piégé fit sa soumission au pape.

Un autre Thomas connut le même destin : Thomas More (1478, 1535) le philosophe humaniste ami d’Erasme

.

Nommé Chancelier par Henri VIII, il désapprouve le divorce du Roi et refuse de reconnaître son autorité en matière religieuse : il démissionne de sa charge en 1532. Il est décapité comme « traître ». Sa canonisation prendra plus de temps que celle de Thomas Becket, elle arrivera en 1935.

Le plus souvent, la coopération était meilleure.

Un saint ministre occupe une place particulière dans la région.

Saint Eloi. (588-660)

Éloi est né vers 588, près de Limoges, de riches parents gallo-romains qui possédaient des mines d'or.

Son père l’envoie en apprentissage chez un orfèvre monnayeur (fonction importante à une époque où les métaux précieux servaient à thésauriser les réserves

Il s’installe à Paris où il entre au service de l'orfèvre Bobbon,.

A ce moment, se produit l’événement qui en fera le saint patron des orfèvres.

Bobbon lui confie une commande du roi Clotaire II (584-629 le vainqueur de Brunehaut).

Il s’agissait de lui fabriquer un trône en or. Le roi lui remet la quantité d'or jugée nécessaire, Éloi se met au travail. Il ne détourne pas d’or, fraude courante à l’époque. Il l’utilise au mieux et remet deux trônes identiques au roi.

Clothaire appelle Eloi auprès de lui. C’est le début d’une carrière profitable au roi, à l’église et à Eloi. Éloi devient contrôleur des mines et métaux, maître des monnaies, puis grand argentier du royaume, équivalent d’un ministre des finances tout en poursuivant sa carrière religieuse.

Clothaire meurt en 629.

Eloi reste en place avec son successeur Dagobert 1er (603-639)

Il organise la circulation monétaire dans le royaume.

Il remplit d’importantes missions diplomatiques, en 636, il amène Judicaël, le duc des Bretons, à faire sa soumission.

Grâce à l’action de son ministre et malgré une mort précoce, Dagobert sera le plus grand des mérovingiens, pas un roi fainéant.

Eloi a exercé une influence certaine sur Dagobert, il en a fait un roi plus chrétien, moins barbare, même s’il a échoué à christianiser les mœurs conjugales du roi resté plus proche de la polygamie que du mariage chrétien (mais la question se posait ainsi : vaut-il mieux tolérer les compagnes multiples ou l’assassinat, courant chez les mérovingiens, de la précédente pour épouser la suivante ?)

Dagobert meurt en 639

En 641, Eloi devient évêque de Noyon un très grand personnage,

le diocèse est énorme, il s’étend de l’Aisne jusqu’aux Pays Bas.

Il fonde plusieurs monastères dont l'abbaye du mont Saint-Éloi à l'ouest d'Arras et la ville de Dunkerque.

Avec saint Ouen, il passe vingt ans à lutter contre les pirates et convertir la population des Flandres et des Pays-Bas.

.

Saint Éloi est généralement considéré comme le saint patron des métallurgistes (orfèvres, forgerons, mécaniciens, chaudronniers.)

Comme les métaux servent à ferrer les chevaux et à fabriquer des outils agricoles, il est aussi le saint patron des cultivateurs et des éleveurs.

Il a été un ministre modèle donc il est aussi le patron des fonctionnaires.

Il est resté très populaire dans son ancien diocèse même si la réforme canonique du calendrier (1969) l’a remplacé par Sainte Florence le 1er décembre.

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