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28 septembre 2016 3 28 /09 /septembre /2016 16:08

Les temps sont durs et l'humanité féroce.

Dans ce décor lugubre, il me faut placer une touche de réconfort, un récit plein d'espoir.

Voici déjà quelque temps, au début de l'été, avec notre comité de jumelage, nous avons rendu visite aux francophones de Dej, en Roumanie.

En hôtes plus que parfaits, ils nous ont organisé un séjour magnifique plein de découvertes et de bonheurs.

La Transylvanie n'est pas uniquement couverte montagnes abruptes et de forêts sauvages, on y circule au fond de larges vallées qui ont fait de ce pays une terre de pénétration et, parfois, ... d'invasion.

Nous avons consacré une matinée à visiter les divers lieux de culte de la ville.

Chaque population ayant apporté ses traditions et sa religion, dans une ville guère plus grande qu'une sous-préfecture, on trouve des églises orthodoxes et catholiques de rite oriental (uniates), un temple protestant et une synagogue.

Avant la visite, je me suis mise en quête d'informations.

Dans le Guide Vert, ressource indispensable, bien qu'insuffisante, pour le touriste lamda, on apprend qu'à Dej, pendant la seconde guerre mondiale, il y avait un ghetto.

Le spectacle de cette synagogue, bâtiment important, aussi grand que les églises chrétiennes, mais trop grand, vide, respirant l'abandon, laissait deviner que la Shoah était passée par là.

Nos hôtes aimables étaient peu enclins à évoquer les temps difficiles, pas plus Antonescu que Ceauscescu, mais j'ai quand-même appris que le ghetto de Dej a été surtout utilisé au printemps 1944.

7 800 juifs y ont été détenus dont les 3 700 habitants juifs de Dej.

Le ghetto fut liquidé en mai. 7,674 juifs furent assassinés à Auschwitz ou périrent sur place, d'épuisement et de faim.

C'est donc une boule d'angoisse à la gorge que j'ai pénétré dans la synagogue où mon regard a tout de suite rencontré la grande armoire vitrée contenant de vieux livres entassés. Il n'a pas fallu longtemps pour comprendre qu'il s'agissait des livres de prière de ceux qui ne reviendraient pas. C'est alors que nous avons été chaleureusement accueillis par le rabbin, coiffé d'un chapeau de paille comme un bon jardinier.

Comprenant que notre petit groupe était fort ignorant, il nous a dressé à grands traits l'histoire tragique de sa communauté en finissant par un petit chiffre qui se suffit à lui-même : 8. Il ne reste que 8 hommes juifs à Dej.

Ce petit nombre ne permet pas de célébrer certains offices qui requièrent la présence de 9 hommes. Ils font appel à leurs coreligionnaires de Cluj Napoca, la capitale régionale, mais cela représente du dérangement et des frais.

C'est alors que j'ai demandé : "Si peu nombreux, pour les cérémonies, avez-vous encore un chantre ?"

La réponse, je vous la donne en mille : " Nous n'avons plus de chantre, ce sont les catholiques d'à côté qui viennent chanter avec nous".

Pas de doute, le dialogue inter-religieux n'a pas besoin des autorités communautaires.

Il existe chez les simples fidèles et c'est ça qui est bon... même pour une athée.

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commentaires

U
Réconfortant ! Des anecdotes comme celle-là, mises bout à bout, sont signe d'espoir ... en l'humanité (ou en ce qui en reste). Merci pour ce témoignage, il fait du bien à ma sensibilité !
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T
C'est bon aussi de voir combien de lecteurs y sont sensibles. Merci de regarder vers l'espoir.
F
Quelle belle histoire ! Et belle réalité !
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T
Il y a bien longtemps que je rageais de ne pas trouver le temps de la raconter. Voilà, c'est fait. Dans une actualité de fanatismes exacerbés, c'est une heureuse éclaircie.
S
Merci pour cette belle histoire. Je t'ai suivi dans cette église-là !
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