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8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 23:00

  Une alarme : le volume des dépassements d'honoraires médicaux a augmenté de plus de 40% en dix ans.
Quelques raretés mises à part, les fameux dépassements restent à la charge du patient, même avec une complémentaire santé, ce qui relativise grandement la réputation d'universalité de notre protection sociale.
Un tri par activité montre une tendance certaine aux dépassements chez les spécialistes pendant que les généralistes ont plutôt l'habitude de rester dans les tarifs encadrés.
Pour affiner le renseignement, voyons la géographie : il apparaît que les zones de bas salaires sont moins touchées par l'inflation des tarifs mais que, parallèlement, le manque de médecins s'y fait sentir.
Résumé : soyons réalistes, la médecine est un commerce, ou plutôt, un artisanat qui obéit comme les autres aux lois de l'offre et la demande.
Un jeune médecin trouve logiquement avantage à se spécialiser et s'installer dans une région à fort pouvoir d'achat ; sans travailler plus, il gagnera plus ( n'en déplaise à Sarko !) Par dessus le marché, il aura  la chance  de supporter  moins  de  patients  peu  décoratifs,  genre  CMU ;  son cabinet  attirera d'autant  plus les clients BCBG... s'il résiste à la concurrence. Ces beaux quartiers attirent le médecin comme le miel attire les mouches, il faut partager la galette. Quand  les clients se font rares, pour faire son chiffre on augmente ses prix ; c'est le cercle vicieux, on devient parfois un smicard de la médecine.
A l'autre extême, le généraliste en région difficile.  Il travaille au tarif sécu ; des clients, il en a. Les soirées-visites succèdent aux journées-consultations, avec
, en prime, toute la paperasserie à gérer et trop souvent un boulot d'assistante sociale bénévole.
Il faudrait alléger ce poids en le partageant, mais les volontaires ne se bousculent pas ; ils préfèrent le miroir aux alouettes des quartiers chics.
Et puis, les études de médecine ne donnent pas le sens du collectif. Ils ont appris à être les meilleurs, pas à partager. Lorsqu'une "maison médicale" se crée, regroupant plusieurs médecins, il s'agit très souvent d'activités juxtaposées mais séparées. Ils ont tous les mêmes horaires.  Les maisons médicales ne soulagent pas l'encombrement des urgences hospitalières.

Mais la raison principale de ce véritable embouteillage des urgences n'est pas là. Il pose d'autres questions plus inconfortables.

Une observation fréquente : "à l'hôpital, les urgences sont encombrées par des gens qui pourraient aller chez leur médecin". On se perd dans un flot de remarques sur l'inconséquence ou le sans-gène des usagers : "pourquoi tiennent-ils à faire la queue pour de la "bobologie" ou, très souvent, un problème qui date de plusieurs jours et ne relève donc pas de l'urgence ?"

La réponse est tristement logique : le patient qui veut s'épargner la dépense, ou qui, simplement, n'a pas les moyens, atterrit aux urgences. L'hôpital reste le dernier recours, la seule garantie d'un service public de la santé.

On nous abreuve régulièrement d'autosatisfaction franchouillarde ; notre protection sociale est meilleure que toutes les autres. Ce n'est pas de l'affirmer avec force qui nous empêchera de relever ce qui fâche.

Comment, dans un pays obsédé par l'égalité, peut-on supporter la juxtaposition d'une médecine de qualité dans les CHU et les grands labos de recherche et la désorganisation coûteuse et antisociale de la médecine ordinaire telle qu'on la vit au quotidien ?

Certes, la solution passerait forcément par une refonte de  la protection sociale,  mais on ratera le coche si on s'arrête à un plan comptable en oubliant de réorganiser les professions médicales.

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