8 juillet 2009
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23:00
Dans les bagages des vacances, tous les ans, il y a des livres. Bon,
d'accord, St Machin -les-bains et St Truc-sur-Mer, ce n'est pas le désert, mais on n'est jamais sûr de ce qu'on va trouver au tabac-presse-dépôt de pain du camping, à part Gala et
Voici. Et puis, blindé de bonnes intentions, on va en profiter pour se mettre à jour, lire tous les livres qu'on a achetés mais qui traînent depuis plusieurs mois.
Ne rêvons pas ; les bouquins qu'on n'a pas trouvé le temps d'ouvrir depuis longtemps, ils finiront les vacances comme ils les ont commencées. Dans le fond, il faut en convenir, s'ils nous avaient réellement attirés on aurait trouvé le temps de les lire, on n'aurait pas eu besoin de l'ennui des vacances pour s'y mettre.
Et puis, ne pas confondre vacances et travaux forcés. Oublions les retards de lecture et faisons-nous plaisir. Achetons les titres qui nous font envie.
Et si on pensait "Histoire" ...?
Justement, il vient de sortir "Attila" de Michel Rouche. Ce que j'ai lu à son propos me donne une envie furieuse d'y plonger.
Attila est au nombre des mal-aimés de l'histoire. Malgré les "Nouveaux Historiens", on a oublié de rouvrir le procès de quelques personnages et il en fait partie.
Grâce aux travaux des archéologues, on découvre une réalité différente des récits à la base de nos traditions historiques.
Le féroce Attila était surnommé le "fléau de Dieu "... Une si mauvaise réputation s'explique facilement : au Vème siècle, l'écriture était, pour ainsi dire, le monopole des moines et les Huns pillaient les abbayes.
Logique, une troupe de nomades pillards n'a rien à voir avec une armée de colonisateurs. Comme ils ne projettent pas de s'installer, s'emparer de la terre et des bâtiments ne les intéresse pas ; ils recherchent l'argent et autres "trésors" qu'ils peuvent emporter. Du numéraire, à cette époque, on n'en trouve pas beaucoup à la campagne, sauf dans les monastères pillés systématiquement. On comprend sans peine que les moines aient cultivé une rancune tenace à l'égard des Huns, suivis par les historiens dont les travaux ont longtemps reposé exclusivement sur l'étude des écrits.
Nous comprenons, aujourd'hui, que les religieux aient noirci leur ennemi à plaisir mais les auteurs des siècles suivants ont aggravé le tableau et n'ont pas échappé aux contresens.
Immanquablement, Attila est affublé du qualificatif "barbare". C'est oublier le sens que les Romains donnaient à ce mot. Le barbare est celui qui ne parle pas la langue des Romains, le latin.
Attila, précisément, n'était pas un barbare.
A l'époque, lorsque deux adversaires faisaient la paix, pour garantir le respect de la parole donnée, ils s'échangeaient des filles à marier et des fils à éduquer. Un abus de langage les a fait nommer "otages", il serait plus conforme à la réalité de parler d'échanges. Attila fut donc éduqué à Rome en compagnie, ironie de l'histoire, d'Aetius son futur vainqueur des Champs Catalauniques. Son éducation soignée l'équipa d'un latin très supérieur à la langue des mercenaires de tous pays qui composaient l'armée romaine.
Les Huns faisaient peur... comme tout ce qui est inconnu. Les Gallo-romains et autres Européens n'étaient pas nombreux à en avoir rencontré. En fait de Huns, il n'est arrivé en Occident qu'un petit comité, la garde rapprochée d'Attila ; le reste de la troupe était formée de Magyars et autres Germains toujours prêts à intégrer une opération de pillage chez plus riches qu'eux. Les batailles qui se sont livrées ont opposé des Germains mercenaires de Rome à ... des Germains ralliés aux entreprises de rapine des Huns. On y rencontre peu de Romains, l'Urbs dépeuplée ne faisant plus d'enfants à fournir aux armées, et peu de Huns véritables, l'Asie centrale est loin.
L'aventure d'Attila et des Huns est d'abord un sujet d'étonnement ; pourquoi ces nomades de l'Asie centrale ont-ils étendu leurs razzias jusqu'en Europe de l'Ouest, à des milliers de kilomètres de leur lieu d'origine ? Même pour d'excellents cavaliers, l'expédition n'était pas banale et leur avancée vers l'ouest a poussé devant eux, par ricochets jusqu'à l'Atlantique, d'autres nomades qui ont complètement modifié le peuplement de l'Europe .
C'est le passé, la question n'intéresse plus que les historiens spécialistes de la chute de l'empire romain ; aucun rapport avec nos préoccupations d'aujourd'hui.
C'est un peu vite conclu.
Depuis que nous réfléchissons sur le bouleversement du climat, un nouveau concept est apparu, celui de réfugiés climatiques. Des populations seraient obligées de quitter leur pays pour refaire leur vie ailleurs. Et si le phénomène avait commencé depuis longtemps ?
Après l'histoire, un peu de géographie.
L'Asie est vaste et, les phénomènes côtiers mis à part, au nord de la zone des moussons, les vents porteurs de pluie soufflent toujours d'ouest en est pour des raisons liées à la rotation de la terre. L'Asie centrale et orientale est donc faiblement arrosée à l'exception des hauts sommets qui accrochent littéralement les quelques nuages encore chargés de pluie. Les terres basses ne reçoivent que très peu de précipitations et leur alimentation en eau, pour abreuver hommes et bêtes et pour l'irrigation, dépend des fleuves dévalant des montagnes arrosées. L'Homme n'a pas amélioré la situation, on connaît la catastrophe subie par la mer d'Aral au XXème siècle, mais la nature elle même a considérablement changé.
Il est aujourd'hui au Xinjiang (le pays des Ouïgours, comme on se retrouve (!), le pire des déserts froids, le Taklamakan, accessible uniquement aux chameaux de Bactriane, avec beaucoup de précautions. Des fouilles réalisées par des archéologues français et chinois, voici trois ou quatre ans, ont mis à jour des vestiges du premier millénaires prouvant l'existance d'une culture avancée, des gens qui menaient une existence confortable. Ces découvertes montrent que le bouleversement hydrologique de la région a commencé en même temps que les grands déplacements de populations dont ce que nous appelons "grandes invasions" n'est que l'aboutissement occidental.
Ce qui est arrivé à l'empire romain et à l'Occident, soyons humbles, n'était que la "queue de comète" d'un changement millénaire et pas encore terminé.
Et si nous regardions d'un autre oeil, les vagues de réfugiés climatiques qui se préparent ?
Ne rêvons pas ; les bouquins qu'on n'a pas trouvé le temps d'ouvrir depuis longtemps, ils finiront les vacances comme ils les ont commencées. Dans le fond, il faut en convenir, s'ils nous avaient réellement attirés on aurait trouvé le temps de les lire, on n'aurait pas eu besoin de l'ennui des vacances pour s'y mettre.
Et puis, ne pas confondre vacances et travaux forcés. Oublions les retards de lecture et faisons-nous plaisir. Achetons les titres qui nous font envie.
Et si on pensait "Histoire" ...?
Justement, il vient de sortir "Attila" de Michel Rouche. Ce que j'ai lu à son propos me donne une envie furieuse d'y plonger.
Attila est au nombre des mal-aimés de l'histoire. Malgré les "Nouveaux Historiens", on a oublié de rouvrir le procès de quelques personnages et il en fait partie.
Grâce aux travaux des archéologues, on découvre une réalité différente des récits à la base de nos traditions historiques.
Le féroce Attila était surnommé le "fléau de Dieu "... Une si mauvaise réputation s'explique facilement : au Vème siècle, l'écriture était, pour ainsi dire, le monopole des moines et les Huns pillaient les abbayes.
Logique, une troupe de nomades pillards n'a rien à voir avec une armée de colonisateurs. Comme ils ne projettent pas de s'installer, s'emparer de la terre et des bâtiments ne les intéresse pas ; ils recherchent l'argent et autres "trésors" qu'ils peuvent emporter. Du numéraire, à cette époque, on n'en trouve pas beaucoup à la campagne, sauf dans les monastères pillés systématiquement. On comprend sans peine que les moines aient cultivé une rancune tenace à l'égard des Huns, suivis par les historiens dont les travaux ont longtemps reposé exclusivement sur l'étude des écrits.
Nous comprenons, aujourd'hui, que les religieux aient noirci leur ennemi à plaisir mais les auteurs des siècles suivants ont aggravé le tableau et n'ont pas échappé aux contresens.
Immanquablement, Attila est affublé du qualificatif "barbare". C'est oublier le sens que les Romains donnaient à ce mot. Le barbare est celui qui ne parle pas la langue des Romains, le latin.
Attila, précisément, n'était pas un barbare.
A l'époque, lorsque deux adversaires faisaient la paix, pour garantir le respect de la parole donnée, ils s'échangeaient des filles à marier et des fils à éduquer. Un abus de langage les a fait nommer "otages", il serait plus conforme à la réalité de parler d'échanges. Attila fut donc éduqué à Rome en compagnie, ironie de l'histoire, d'Aetius son futur vainqueur des Champs Catalauniques. Son éducation soignée l'équipa d'un latin très supérieur à la langue des mercenaires de tous pays qui composaient l'armée romaine.
Les Huns faisaient peur... comme tout ce qui est inconnu. Les Gallo-romains et autres Européens n'étaient pas nombreux à en avoir rencontré. En fait de Huns, il n'est arrivé en Occident qu'un petit comité, la garde rapprochée d'Attila ; le reste de la troupe était formée de Magyars et autres Germains toujours prêts à intégrer une opération de pillage chez plus riches qu'eux. Les batailles qui se sont livrées ont opposé des Germains mercenaires de Rome à ... des Germains ralliés aux entreprises de rapine des Huns. On y rencontre peu de Romains, l'Urbs dépeuplée ne faisant plus d'enfants à fournir aux armées, et peu de Huns véritables, l'Asie centrale est loin.
L'aventure d'Attila et des Huns est d'abord un sujet d'étonnement ; pourquoi ces nomades de l'Asie centrale ont-ils étendu leurs razzias jusqu'en Europe de l'Ouest, à des milliers de kilomètres de leur lieu d'origine ? Même pour d'excellents cavaliers, l'expédition n'était pas banale et leur avancée vers l'ouest a poussé devant eux, par ricochets jusqu'à l'Atlantique, d'autres nomades qui ont complètement modifié le peuplement de l'Europe .
C'est le passé, la question n'intéresse plus que les historiens spécialistes de la chute de l'empire romain ; aucun rapport avec nos préoccupations d'aujourd'hui.
C'est un peu vite conclu.
Depuis que nous réfléchissons sur le bouleversement du climat, un nouveau concept est apparu, celui de réfugiés climatiques. Des populations seraient obligées de quitter leur pays pour refaire leur vie ailleurs. Et si le phénomène avait commencé depuis longtemps ?
Après l'histoire, un peu de géographie.
L'Asie est vaste et, les phénomènes côtiers mis à part, au nord de la zone des moussons, les vents porteurs de pluie soufflent toujours d'ouest en est pour des raisons liées à la rotation de la terre. L'Asie centrale et orientale est donc faiblement arrosée à l'exception des hauts sommets qui accrochent littéralement les quelques nuages encore chargés de pluie. Les terres basses ne reçoivent que très peu de précipitations et leur alimentation en eau, pour abreuver hommes et bêtes et pour l'irrigation, dépend des fleuves dévalant des montagnes arrosées. L'Homme n'a pas amélioré la situation, on connaît la catastrophe subie par la mer d'Aral au XXème siècle, mais la nature elle même a considérablement changé.
Il est aujourd'hui au Xinjiang (le pays des Ouïgours, comme on se retrouve (!), le pire des déserts froids, le Taklamakan, accessible uniquement aux chameaux de Bactriane, avec beaucoup de précautions. Des fouilles réalisées par des archéologues français et chinois, voici trois ou quatre ans, ont mis à jour des vestiges du premier millénaires prouvant l'existance d'une culture avancée, des gens qui menaient une existence confortable. Ces découvertes montrent que le bouleversement hydrologique de la région a commencé en même temps que les grands déplacements de populations dont ce que nous appelons "grandes invasions" n'est que l'aboutissement occidental.
Ce qui est arrivé à l'empire romain et à l'Occident, soyons humbles, n'était que la "queue de comète" d'un changement millénaire et pas encore terminé.
Et si nous regardions d'un autre oeil, les vagues de réfugiés climatiques qui se préparent ?