Notre feuilleton -
historique-mais-sans-prétention -était un peu endormi ; des urgences avaient pris sa place.
Et puis, télescopage : l'actualité vient le ranimer.
Petit rappel de procédure : comment un mortel ordinaire est-il fait
saint et par qui ?
D'abord, il faut mourir...Jusque là : sans difficulté, tout le monde en est capable. Ensuite, il faut avoir laissé suffisamment de bons souvenirs aux gens qu'il faut , pour que ces derniers
demandent au pape de vous faire saint.
Comme le pape ne veut pas avoir l'air d'imposer ses chouchous, il confie l'affaire à une commission ad'hoc composée d'éminences et autres excellences siégeant au Vatican, à proximité immédiate de
la bonne parole papale (en fin de compte, il décide comme il veut).
En souvenir de l'Inquisition, la cause du prétendant est instruite sous forme de procès.
On aligne face-à-face les arguments pour et contre (le célèbre
avocat du diable).
Amusant : parmi les critères qui font la sainteté, il faut avoir fait au moins un miracle.
Si le positif l'emporte et qu'il n'existe pas d'opposition rédhibitoire, on procède à la béatification : le candidat devient
bienheureux . Encore un effort et c'est la canonisation qui
en fait un
saint, dans un délai plus ou moins long, selon l'empressement des juges...et la force de la pression pontificale.
Certains dossiers ont musardé pendant des siècles, d'autres ont été bouclés avec une rapidité ... miraculeuse ; on pense immédiatement à Josemaria Escriva de Balaguer, fondateur de la très
réactionnaire Opus Dei. ... On se demande quels miracles il a bien pu faire, celui-là ...
Le péché mignon (!) des papes qui veulent laisser leur marque dans l'histoire est d'ouvrir de nouveaux dossiers et de pousser les anciens qui traînent.
Benoît XVI a ressenti la même démangeaison que ses prédécesseurs en mettant de l'ordre dans les archives du Vatican.
- Et qu'a-t'il découvert ? - Ciel ! Pie XII n'est toujours pas béatifié.
Anormal pour un pape. Même les plus insignifiants sont arrivés au moins à ce niveau.
Il faut se bouger : "Nous prions pour que la cause de béatification de Pie XII se poursuive heureusement"
Il y a comme un malaise ... les cardinaux un peu diplomates auraient aimé que cette affaire s'enterrât dans le silence et se couvrît de poussière. L'Eglise a largement assez de problèmes à
résoudre ; on n'avait pas besoin d'aller déterrer cette mine toujours explosive.
Pie XII, c'est le pape de la seconde guerre mondiale. Il s'est tu devant les exactions des nazis, il a fait preuve d'un silence assourdissant devant la solution finale. D'après Benoît XVI, "la
discrétion était au nombre de l'héroïcité de ses vertus."
De la part d'un chef religieux dont on attend qu'il soit une grande voix, c'est une qualité discutable, d'autant que l'Eglise Catholique s'est montrée beaucoup plus active, après la guerre, pour
ex-filtrer les anciens bourreaux vers l'Amérique du Sud et ses dictatures hospitalières expertes en recyclage des rebuts, le tout avec la bénédiction d'un Pie XII compatissant .
Il faut dire que ce n'était pas son coup d'essai. Après la première guerre mondiale, pendant la révolte spartakiste, le futur Pie XII était nonce apostolique (ambassadeur du Vatican) à
Berlin. Au moment de l'écrasement, quelques révoltés, parmi lesquels Rosa Luxemburg, ont tenté de se réfugier à la nonciature, ils croyaient probablement au vieux principe chrétien du
"droit d'asile". Ils s'étaient bercés d'illusions ; le nonce Pacelli les a livrés, ils ont été exécutés.
Tout cela dresse un curieux tableau de saint.
Pourquoi Benoît XVI tient-il à sauver sa mémoire ?
Quitte à passer pour malintentionnés, nous nous rappellerons que Benoi XVI, né Ratzinger, affectueusement surnommé
Panzercardinal, a fait partie des jeunesses hitlériennes. On nous a
expliqué qu'il n'avait pas pu agir autrement : c'était un passage obligé pour les jeunes gens qui voulaient mener de grandes études. Passons ... mais, précisément, faire la promotion d'un
prédécesseur encore plus sali que lui dans l'hitlérisme n'est pas le meilleur moyen de faire croire à son innocence.
Je plains les catholiques de bonne volonté qui essaient de faire croire à la possibilité d'un renouveau pontifical.
Et voilà un commentaire d'
nfolive tv ( media israélien) :
De nombreux efforts sont déployés dans le but de béatifier le pape Pie XII, en
fonction durant la Shoah. Malgré l'opposition d'Israël et du monde juif, il semblerait que le Vatican continuera le processus. Lors d'une messe au Vatican célébrant le cinquantième anniversaire
de la mort de Pie XII, au début du mois, Benoît XVI a souhaité la poursuite du procès en béatification de ce pape qui fait l'objet d'une controverse pour son attitude jugée trop passive et
silencieuse face à la Shoah.
Benoît XVI a estimé que Pie XII s'était dépensé sans compter "pour la défense des persécutés sans aucune distinction de religion, d'ethnie, de
nationalité et d'appartenance politique", notamment pour les juifs menacés d'extermination, et déploré que le débat historique à son sujet n'ait "pas toujours été serein". Le grand rabbin de
Haïfa, Shear Yshuv Cohen, premier religieux juif invité à s'exprimer devant un synode d'évêques catholiques actuellement réuni au Vatican, s'était fait l'écho des réserves de nombreux juifs
face à ce procès en béatification. Il avait estimé que Pie XII "ne doit pas être pris comme modèle et ne doit pas être béatifié parce qu'il n'a pas élevé sa voix face à la Shoah".
La béatification de Pie XII reste un sujet brulant qui risque d'influencer sur les relations entre le Vatican et Israël mais aussi sur les relations
judéo-chrétiennes. En effet, le mouvement du crif ( Conseil représentatif des institutions juives de France) a déjà mis en garde: «La béatification du pape Pie XII, en dehors d’un consensus
d’historiens indépendants, risquerait de porter un coup dur aux relations de confiance qui se sont établies entre l’Eglise catholique et le monde juif», a déclaré Richard Prasquier, président
de l'organisation à un media français. Le monde juif reproche à Pie XII sa passivité durant les horreurs de la Shoah.
D'autre part les divergences envers ce Pape semblent influencer sur une éventuelle visite du pape Benoit XVI en Israël. En effet, Israël a renouvelé une
invitation à l'intention du pape Benoît XVI à se rendre en pèlerinage en Terre sainte. La polémique autour de cette visite a éclaté il y a quelques jours lorsque le père Gumpel, le "défenseur"
de la cause de Pie XII dans le processus de béatification, a fait allusion a cette visite. Selon lui, Benoît XVI « voudrait aller en Israël le plus rapidement possible » mais il ne pourra pas
le faire tant que la légende sous la photo de Pie XII dans le Musée de l’Histoire de la Shoah de Yad Vashem, à Jérusalem, « une évidente falsification de l’Histoire, ne sera pas enlevée ».
Cette légende accuse le pape de ne pas avoir élevé sa voix contre la Shoah. Tant que cette légende demeure sous la photo, un éventuel voyage de Benoît XVI en Israël serait « un scandale pour
les catholiques », a ajouté le père Gumpel.
En attendant, le Vatican ainsi que la présidence israélienne se sont dépêchés de taire le scandale. Dans une déclaration, le directeur du bureau de
presse du Vatican, Federico Lombardi, a dit, entre autres : « Le Vatican a démenti les assertions selon lesquelles une légende qui figure au Musée de l’Holocauste de Jérusalem, affirmant que
Pie XII n’a pas fait suffisamment pour sauver des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale, empêcherait le Pape Benoît XVI de venir en visite en Israël. « Ce fait ne peut être considéré
comme un facteur déterminant pour une décision concernant une visite du Saint Père en Terre Sainte, un voyage qui, comme on le sait, est l’un des désirs du pape, mais qui, pour l’instant, n’a
pas fait l’objet d’une planification concrète ».
Shimon Peres a lui aussi affirmé qu'il ne fallait pas lier la visite du pape en Israël aux divergence sur Pie XII. "Je connais le pape Benoît XVI que
j'ai rencontré plusieurs fois, et sa visite en Israël ne doit pas être liée à la controverse sur Pie XII", a-t-il déclaré à la radio publique israélienne.
Il semblerait que Yad Vashem également tente de calmer la tempête et a de son côté publié dimanche un communiqué rappelant que les historiens sont
partagés sur le rôle de Pie XII. 20/10/08